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foule attroupee quand César prenait terre, quand les haches romaines entraient dans le palais des rois : déjà les meurtres nombreux consommés sur les légionnaires dans les rues de la ville, lui indiquaient assez en quel péril extrême il allait se trouver, noyé qu’il etait avec sa petite armée au milieu de ces masses irritées. Les vents du nord régnaient alors : se rembarquer devenait chose difficile, et le signal donné de monter sur les vaisseaux eût dégénéré vite en signal d’insu1·rection. Partir, d’ailleurs, sans mettre à fin son entreprise, n’était point dans les habitudes de César. Aussitôt il appelle des renforts d’Asie, gardant jusqu’à leur arrivée les apparences de la plus entiere sécurité. Jamais on n’avait mené au camp plus joyeuse vie que durant ce séjour dans Alexandrie, et quand la belle et artificieuse reine, gracieuse envers tous, prodiguait les séductions à l’adresse de son juge, César, a son tour, affectait l’oubli de ses hauts faits pour ne plus songer qu’à ses victoires galantes 1, Prologue joyeux à la veille d’un sombre drame ! Tout-à-coup, amené par Acbillas, et, ce qui fut vérifié plus tard, mandé par l’ordre secret du roi et de son tuteur, le corps romain d’occupation entre dans Alexandrie. Dès qu’ils apprennent qu’il n’est venu que pour attaquer César, tous les Alexandrins font avec lui cause commune. Mais César, avec cette présence d’esprit qui absout presque sa témérité, rassemble tout son monde épars sans perdre un seul moment, met la main sur le petit roi et ses ministres, se barricade dans le château et dans le théâtre voisin, et, comme il _ne peut mettre en sûreté la flotte egyptienne stationnée dans le grand port au-devant de ce théatre, il la brûle et envoye des

• [Plat.- (Cass. 49) raconte qu’elle se fit porter à son insu dans sa chambre, et se donna bientôt à lui. —- V. Lucan. 10, 74. ’

c « Sangùinc Thessalicaz cladis perfusus adulter « Admisit Venerem curis et miscuit armis... » _

— Voir sur la beauté de Cléopâtre, ce qu’en_ dit Plutarch. Anton. 27. — cf. Dio. 43, 53.]