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_ 232 · LIVRE III, CHAPITRE XIV- ripide au_ contraire, il ne se fait plus que la terne lueur ' de la méditation morale : au lieu des dieux, vous êtes en · face de conceptions abstraites; par-ci par-là seulement ` les rares éclairs des passions traversent 'les nuages gri- sâtres du ciel. La vieille et intime croyanceau destin a disparu du fond des âmes : le destin n'est plus qu'un despote tyrannisant les corps , et dont lesvictiines _traînent leurs chaînes en grincant des dents ! L’absence de foi, ou mieux, la foi au désespoir, rencontre dans la bouche du poëte des accents d’une puissance démo- niaque. On le conçoit, du reste, Euripide n'arrive plus . a· cette hauteur des conceptions plastiques, ou l’artiste emporté par sa création se perd en elle; ou l'effet · poétique triomphe et éclate dans l’œuvre tout entière. De là son insoiiciance marquée pour la composition même de ses fables tragiques : souvent il les esquisse . à la hâte; il ne ramène ni l’action ni le personnage à — uncentre puissant : c’est Euripide encore qui invente, , - à proprement parler, le prologue familier ou se construit le nœud de l’intriguc et l’apparition commode, pour la ' dénouer à la fin, du Deus em macloimî, ou de tel autre · procédé pareillement grossier. ' _ ' En revanche, il·est merveilleux dans les détails, et sait faire oublier l’irréparable défaut du manque d’en— semble par l’infinic multiplicité des effets. Là, il est vraiment un maît1·e, quoique entaclié souvent de senti- I mentalité sensuelle et recherchant de préférence les . assaisonnements de' haut goût , quoique relevant l`amour par le meurtre et l’inceste, et aiguillonnant ai11si la sensibilité purement physique du spectateur! Certes rien de plus beau dans leur genre que la peinture de f Polyxène et de sa mort volontaire, que celle de Phèdre consumée par la flamme de son amour clandestin, et par-dessus tout, que le tableau splendide de ces·Bac— chantes soulevées par un mystérieux délirel Pourtant