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. 230_ ' _. LIVRÉ Ill-, CHAPITRE XIV , tragédie gréco-romaine, j'estime qu’il m'est indispen- sable d'esquisser en peu de mots les caractères I`onda- mentaux de son système dramatique. Euripide appar- ` tient à la cohorte des poëtes envisageant pour leur art les plus hautes et les plusnobles destinées, mais qui, une fois en marche, avec le sentiment parlait de leur idéal, sc voient trahis par leurs forces et restent en deca du but. I Le mot vrai, le mot profond de la tragédie, celui qui la résume moralement et poétiquement, c'est que pour i l'homme agir et soulirir sont tout un. Telle fut la maxime du drame tragique chez. les anciens : il inet en scène l’homme agissant et soulïrant, mais sans l’indi- vidualiser jamais. La grandeur d’Eschyle ne saurait `etre surpassée, quand il nous fait voir l’homme aux prises avec le destin,4et le secret de cette grandeur réside précisément ·dans sa peinture, vue de haut et d’ensemble. Les puissances luttant entre ellcs y sont · csquissées à grands traits: ce qu'il y a de l’honnne et de l'individu dans Prométhée, dans Agamemnon, disparait dans une sorte de nimbe poétique. Sophocle se rapproche davantage de nous ail retrace déjà en largcs traits 4 quelquesÃuncs des conditions sociales; il peint le roi, le vieillard, la sœur : mais le microcosme humain observé · sous toutes ses faces , voilà ce qui échappe 51 ses · héroïques pinceaux. Déjà il atteint a un beau résultat; il ·n'atteint pas au résultat le plus parlait. Montrer l’homme tout entier,· savoi1· (`ondreien un ensemble ` idéal toutes ces figures, achevées chacune en soi _et gpourtant distinctes, c'eût été la un merveilleux progrès! Et sous ce rapport, il faut, bien.l’avouer, les génies d'Eschyle et de Sophocle sont restés en decà de Shakspeare! Vient à son tour Euripide qui, lui, en- 4 treprend de peindre l’homme tel qu'il est. Évolution toute logique, historique même si l’on peut dn·e, mais oula poésie n'a plus rien à gagner.