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LIVRE III. CHAPITRE IV

seuse et lâche des serviteurs du veau d’or, des vieillards affaiblis par l’âge, et des hommes légers, qui, voulant vivre et mourir en paix, s’efforcent de reculer à tout prix la bataille suprême. Dans Carthage aussi, le parti de la paix et le parti de la guerre étaient en présence, se rattachant l’un et l’autre, comme bien on pense, aux deux doctrines hostiles, conservatrice et réformiste : le premier s’appuyant sur le pouvoir exécutif, sur le conseil, des anciens, et le conseil des Cent, et ayant à sa tête Hannon, dit le Grand: le second, représenté par les meneurs populaires, par· Hasdrubal notamment, avec les officiers de l’ancienne armée de Sicile, tant de fois victorieuse sous les ordres d’Hamilcar, et dont les succès, pour être demeurés stériles, n’enseignaient·pas moins aux patriotes quelle était la route à suivre pour triompher des immenses dangers de l’heure actuelle. Depuis longtemps déjà les deux factions se combattaient, quand éclata la guerre libyque; Le parti des magistrats avait fait naître l`émeute en prenant toutes les folles mesures qui annihi- lèrent les précautions organisées par les officiers de Sicile; puis l’inhumanité du système administratif avait changé l'émeute en révolution. Enfin l’incapacité militaire de ce parti, surtout celle d’Hannon,·son chef et le fléau de l’armée, avait amené l’État à deux doigts de sa perte. Alors, et sous le coup des extrémités les plus terribles, on avait dû rappeler Hamilcar Barcas, le héros d’Eirctè. A lui de sauver les gouvernants des effets de leurs fautes et de leurs crimes. Il prend le commandement, et dans sa magnanimité patriotique, il ne s’en démet point, même quand on lui donne Hannon pour collègue. Les troupes renvoient-elles celui-ci indignées, il cède aux supplications des magistrats et lui rend une seconde fois la moitié du généralat; et bientôt, malgré les ennemis de Carthage, malgré son collègue, et gràce à son autorité sur les soldats soulevés, à ses négociations