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L’ÉGALITÉ CIVILE

généraux virent lever devant eux les barrières légales[1]. On peut citer quelques exemples comme celui de Quintus Fabius Rullianus cinq fois consul en vingt-huit ans, ou celui de Marcus Valerius Corvus, six fois consul de 370-271 av. J.-C.384 à 483, la première fois à vingt-trois ans, la dernière fois à soixante-douze ; dont le bras fut le soutien de la cité et la terreur des ennemis durant trois générations d’hommes, et qui mourut centenaire.

Le tribunat du peuple. Son rôle dans le gouvernement.Pendant que les magistrats romains descendent de la condition élevée de souverain absolu, à celle chaque jour plus diminuée et restreinte de fonctionnaire et de mandataire de la Cité, la vieille magistrature opposante des tribuns du peuple subit aussi, au dedans bien plus qu’au dehors, les effets d’une réaction pareille. Créée pour protéger (auxilium) même révolutionnairement, les faibles et les petits contre la superbe et les excès de pouvoir des hauts fonctionnaires, elle avait bientôt conduit en outre à la conquête des droits politiques donnés aux simples citoyens, et à la destruction des privilèges de la noblesse. Ce second but était atteint : mais l’idée première du tribunat avait été purement démocratique : les conquêtes à faire dans l’ordre politique ne venaient que bien après. Quant à l’idée démocratique, elle n’était, certes, pas plus odieuse au patriciat lui-même, qu’à

  1. Quand l’on rapproche ensemble les listes consulaires, avant et après 342.412, on ne conserve pas de doutes sur la réalité de la loi prohibitive des réélections au consulat. Avant 412 on voit des consuls nommés de nouveau au bout de trois ou quatre ans ; après cette date, on ne les voit plus réélus qu’au bout d’un intervalle de dix ans au moins. Il y a des exceptions fréquentes à la règle, cependant, surtout pendant les guerres si rudes de 320-311.434 à 443. Mais la loi proscrivant le cumul est rigoureusement observée. On ne pourrait pas citer un seul exemple certain du cumul de deux magistratures curules (Tit.-Liv., xxxix, 39, 4), consulat, préture ou édilité curule : il en est autrement des autres fonctions. L’édilité curule est cumulée par exemple avec la charge de maître de cavalerie (Tit.-Liv., xxiii, 24, 30) ; la préture avec la censure (Fast. Capit. an. 501) ; la préture avec la dictature (Tit.-Liv., viii, 12) ; le consulat enfin avec cette même dignité (Tit.-Liv., viii, 12).