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LIVRE II, CHAP. I

des non-citoyens qui aspirent à la cité. De là les agitations de la plèbe, des Latins, des Italiens, des affranchis. Tous, qu’ils portent déjà le nom de citoyens, comme les plébéiens et les affranchis, ou que ce nom leur soit refusé encore, comme aux Latins et aux Italiens, tous ressentent le besoin de l’égalité politique, et la réclament.

Il y a en jeu un troisième antagonisme : en face des riches sont les anciens propriétaires dépossédés, et ceux que la pauvreté mine. À la faveur des institutions juridiques et politiques de Rome, il s’était formé un grand nombre d’exploitations rurales appartenant, les unes à de petits propriétaires dans la dépendance des grands capitalistes, les autres à de petits fermiers à temps ; ceux-ci dans la dépendance des maîtres du fonds. La liberté individuelle demeurant d’ailleurs intacte, on vit souvent de simples particuliers, ou des communautés entières dépouillées de leurs possessions en terres. Aussi le prolétariat, dans les campagnes, devint-il rapidement nombreux et fort : avant peu, si l’on n’y pourvoyait, il allait empiéter sur les destinées de l’État. Quant au prolétariat dans les villes, il n’atteignit que plus tard à l’importance politique.

C’est au milieu de ces luttes que se meut l’histoire intérieure de Rome, semblable en cela sans doute à celle des autres cités italiques. Abolition de la fonction souveraine à vie.Agitation politique au sein des citoyens ; guerre ouverte entre ceux qui sont exclus et ceux qui les repoussent ; conflit social entre ceux qui possèdent et ceux qui ne possèdent pas : tous ces mouvements se croisent, s’entremêlent, parfois se coalisent d’une façon étrange ; et, au fond, diffèrent tous entre eux.

La réforme de Servius, sous le rapport de la Loi du service militaire, avait mis les simples habitants sur la même ligne que les vrais citoyens ; mais, en faisant cela,