Page:Mommsen - Histoire romaine - Tome 2.djvu/79

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
75
L'ÉGALITÉ CIVILE

elle n’a n’en pu faire, il est vrai, que se tourmenter elle-même et tourmenter les autres : encore s’est-elle agitée autant qu’elle l’a pu. Quelques années après la loi Ogulnia, en 296 av. J.-C.458, se rencontre un incident qui peint bien les situations. Une patricienne ayant donné sa main à un plébéien considérable, et qui avait revêtu les plus hautes dignités, les dames nobles l’expulsèrent, à raison de cette mésalliance, et de leur société, et de la solennité des fêtes célébrées en l’honneur de la chasteté des femmes. Par suite, il y eut depuis lors à Rome une Déesse de la chasteté pour les patriciennes, et une autre pour les plébéiennes. Ces velléités hargneuses étaient peu graves, sans doute, et les grandes familles, pour la plupart, ne se laissaient point aller à ces actes mesquins de mauvaise humeur. Ils n’en suscitaient pas moins des deux côtés un mécontentement profond ; et s’il est vrai que la lutte du peuple contre les nobles a été dans les nécessités de la situation politique et sociale, les longs ébranlements qu’elle a causés et qui se continuèrent après elle, les combats d’arrière-garde après la bataille décisive, et enfin les querelles petites et vides de rang et de caste, ont aussi bien gratuitement porté une sérieuse atteinte, et jusqu’à un certain point même, la désorganisation dans toutes les institutions de la vie publique et privée des Romains.

Quoi qu’il en soit, l’un des objets du compromis, de 367 av. J.-C.387 était atteint pleinement, et le patriciat mis de côté. En peut-on Détresse sociale. Efforts pour y remédier.dire autant des deux autres buts qu’on se proposait ? Le nouvel ordre de choses avait-il vraiment résolu le problème des misères sociales et fondé l’égalité politique ? L’un et l’autre étaient étroitement liés ensemble. Si les vices du système économique entraînaient la ruine des classes moyennes, et le partage des citoyens en une classe peu nombreuse de riches et la foule souffrante des prolétaires, l’égalité civile devenant