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LIVRE II, CHAP. III

guer des lois relatives aux délits en matière de candidature[1] ; ces lois, comme on le pense, demeurèrent sans succès. Lorsque la corruption ou la menace n’avaient pas raison des électeurs, ceux qui dirigeaient l’élection savaient encore s’en rendre maîtres, soit en portant sur la liste des propositions des candidats plébéiens en grand nombre, et en divisant ainsi les voix opposantes ; soit encore en ne portant pas sur cette même liste les noms de ceux que la majorité aurait certainement élus. En dépit de leurs efforts, avaient-ils eu le désavantage, ils se retournaient vers les prêtres, et demandaient si quelque nullité n’avait point été commise dans les auspices, ou dans les autres cérémonies pieuses accompagnant l’élection. Sans se préoccuper des conséquences, et foulant aux pieds les sages exemples des aïeux, on finit par faire prévaloir une règle qui attribuait indirectement aux collèges des augures le droit d’infirmer, lois ou élections, tous les actes politiques émanés du peuple. Par suite, bien que, dès l’année 445 av. J.-C.309, les plébéiens eussent conquis l’éligibilité légale ; bien que, depuis lors, leur droit fût demeuré incontesté, on ne vit jamais, avant 409 av. J.-C.345, un plébéien élu questeur, et le premier tribun militaire sorti des rangs du peuple ne fut nommé qu’en 400 av. J.-C.354. Au lendemain de l’abolition légale des privilèges nobles, l’aristocratie plébéienne n’avait pu, en aucune façon, se mettre sur un pied vrai d’égalité avec l’aristocratie patricienne. Beaucoup de causes donnent la raison de ce fait. Si la noblesse, cédant à la tempête avait dû, pour un moment, et sur le terrain du droit, abandonner la défense obstinée de ses prérogatives, elle releva aussitôt la tête dans les luttes annuelles pour l’élection des hautes magistratures. Et puis, quelles facilités ne lui laissaient pas les dissentiments intérieurs entre les chefs de l’aris-

  1. [De ambitu.]