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LE TRIBUNAT DU PEUPLE

vant lequel, entre deux magistrats égaux, celui qui prohibe l’emporte sur celui qui ordonne. Le nombre primitif des tribuns, nombre accru bientôt, il est vrai ; la durée annale de leur charge, prenant fin au 10 décembre ; leur inamovibilité ; tout, chez eux, ressemble aux institutions consulaires ; tout, jusqu’à ces privilèges existant de collègue à collègue, en vertu desquels chaque consul, chaque tribun, revêt la plénitude des pouvoirs ; en vertu desquels aussi, en cas de conflit entre les magistrats du même titre, force reste au véto d’un seul sans tenir compte des autres voix. Quand un tribun dit non, il arrête les volontés de tous ses collègues, et quand il accuse, chacun d’eux peut fermer la route à son accusation. Consuls et tribuns ont également et concurremment la juridiction criminelle. Si les premiers ont à leur côté, les deux questeurs, les seconds ont les édiles[1]. Les consuls appartenaient au patriciat : nécessairement les tribuns sortaient du peuple : tous étaient pris dans les rangs des citoyens, mais tandis que les consuls, commandants en chef de l’armée, s’élisaient dans les comices par centuries, ceux-ci, qui n’avaient pas l’imperium (ou commandement militaire), étaient nommés dans les assemblées purement civiles des curies

  1. De toute évidence, l’institution des édiles plébéiens répond à celle des questeurs patriciens, comme les tribuns du peuple répondent aux consuls sortis du patriciat. Ce fait ressort, et des attributions criminelles de l’édilité et de la questure, où la compétence est la même, si les tendances diffèrent ; et de leurs attributions relatives à la garde des archives. Le temple de Cérès est, pour les édiles, ce qui le temple de Saturne est pour les questeurs. Ils en tirent même leur nom (œdes, édifice, sanctuaire). Il faut noter comme très remarquable la loi de l’an 449 av. J.-C.305 (Tit.-Liv., 3, 55) ordonnant pour l’avenir le dépôt des sénatus-consultes dans le temple de Cérès sous la garde des édiles alors que toujours, comme on sait et même après la réconciliation entre les ordres, ces décisions avaient été exclusivement portées dans le temple de Saturne et confiées aux questeurs. Nous admettons aussi que le peuple (plebs) a eu sa caisse, gérée de même par ces édiles. On le doit supposer, à voir l’usage auquel ceux-ci appliquaient les amendes (multœ) versées dans leurs mains mais ce n’est là qu’une probabilité et non une certitude.