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LE TRIBUNAT DU PEUPLE

portée sur l’appel déféré à l’assemblée des tribus furent, sans nul doute, expressément réglementées par la loi, tout comme l’étaient la juridiction des consuls ou des questeurs, et la sentence des centuries, en cas de provocation. Mais les crimes d’État (I, p. 204) et les contraventions de police administrative (I, p. 205) n’avaient point encore reçu leur définition légale ; les limites des délits étaient difficiles à poser, pour ne pas dire impossibles ; et la justice en cette matière dégénéra forcément en un pur arbitraire. L’idée du droit allait se troublant au milieu des luttes intestines entre les classes ; et les chefs donnés aux partis par la loi politique, se faisant concurrence dans les choses même de la justice, celle-ci devint plutôt une affaire de police, sans règles certaines et préfixées. Les hauts magistrats furent les premiers atteints. Dans l’esprit de la constitution, ceux-ci, tant qu’ils étaient en activité, n’avaient à répondre devant aucune juridiction : ils demeuraient irresponsables en tant qu’ils auraient agi comme fonctionnaires, et dans les limites de leurs attributions. Jusque dans l’institution et l’organisation de l’appel, ce principe avait été respecté (p. 10). Aujourd’hui, la puissance tribunitienne est créée ; et par elle, aussitôt, ou un peu plus tard, un contrôle s’établit sur toutes les magistratures, contrôle d’autant plus redoutable, que ni le crime ni la peine n’ont de définition ou de sanction dans la loi écrite. En résumé, la concurrence des juridictions consulaires et tribunitiennes livre tous les citoyens corps et biens, à la décision souveraine et arbitraire des assemblées des partis.

La législation.À la concurrence de juridiction s’ajouta ensuite la concurrence des initiatives légiférantes. Le tribun, qui allait d’abord défendre sa sentence criminelle devant le peuple, fut volontiers conduit à le convoquer, à lui parler ou faire parler pour un tout autre objet. La faculté