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LE TRIBUNAT DU PEUPLE

consuls, ils avaient une situation absolument indépendante, sans que pour cela les pouvoirs fussent en rien partagés. Les tribuns du peuple avaient droit, d’une part, d’annuler par leur opposition personnelle et interposée dans les délais légaux, toute décision d’un magistrat faisant grief à un citoyen quelconque : d’un autre côté, leur compétence était illimitée en matière de justice criminelle, et ils allaient, en cas d’appel, défendre leur sentence devant l’assemblée du peuple. Ce privilège les conduisit à un autre : on les vit bientôt porter la parole devant le peuple, et proposer les plébiscites à son vote.

L'intercession.La puissance tribunitienne (tribunitia potestas) était donc en droit d’arrêter à son gré et la marche de l’administration, et l’exécution des jugements : elle pouvait permettre au redevable du service militaire de se soustraire impunément à l’appel : elle empêchait ou faisait cesser l’arrestation du débiteur, la détention du prévenu : son action, enfin, touchait à toutes choses. De plus, comme l’absence du protecteur du peuple eût pu rendre parfois le recours illusoire, il lui fut défendu par la loi de passer même une seule nuit hors des murs de la ville ; jour et nuit, sa porte restait ouverte. Mais les tribuns ne pouvaient faire que le juge ne statuât, que le sénat ne prît sa décision, et que les centuries n’émissent leurs votes. Seulement et en vertu de leur fonction comme juges, ils pouvaient mander par leurs appariteurs[1], et devant leur tribunal tout citoyen, quel qu’il fût, le consul en fonctions lui-même ; le faire appréhender au corps, en cas de contumace, le mettre en détention préventive, ou exiger une caution, enfin, prononcer la peine capitale ou l’amende. Les deux édiles populaires, créés en même temps qu’eux les assistaient alors, à titre d’of-

  1. [Viatores.]