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GUERRE ENTRE ROME ET LE ROI PYRRHUS

jeté bien loin les habitudes de vie des sultans orientaux : comme Alexandre, enfin, il passait pour le meilleur tacticien de son siècle. Mais, dans le reste du pays, les susceptibilités vaniteuses d’une nationalité exclusive auraient donné l’avantage au compatriote le plus indigne sur l’étranger le plus capable : l’armée Macédonienne se montrait imprudemment réfractaire contre tout général qui n’était pas Macédonien ; et de même que le meilleur capitaine de l’école d’Alexandre n’avait pu, ailleurs, l’emporter contre de si grands obstacles, de même une rapide catastrophe mit fin à la domination du roi Épirote dans la Macédoine. Celui ci ne pouvait garder le trône qu’avec l’assentiment et l’affection de la contrée : trop peu puissant d’ailleurs, trop magnanime peut-être pour s’imposer par la force, après sept mois de règne, il abandonna les Macédoniens à leurs tristes affaires, à leur triste gouvernement, et retourna au milieu de ses chers Épirotes (467). Mais l’homme qui avait porté un instant287 av. J.-C. la couronne d’Alexandre, le beau-frère de Démétrius, le gendre des Lagides et d’Agathocle de Syracuse, le profond stratégiste qui écrivait ses Mémoires et des traités scientifiques sur l’art dé la guerre, ne pouvait pas condamner sa vie aux ennuis d’une paix obscure ; révisant, à chaque saison, les comptes de ses intendants et des pasteurs des troupeaux royaux ; ne demandant à ses vaillants sujets, et ne recevant d’eux que les cadeaux ordinaires et périodiques en bœufs et en brebis ; ou leur faisant ensuite renouveler le serment de fidélité devant l’autel de Jupiter ; jurant lui-même en échange d’observer religieusement les lois nationales ; puis, en confirmation des paroles données, passant la nuit avec eux dans un banquet final ! Il n’y a plus place pour Pyrrhus sur le trône de Macédoine ; eh bien ! il saur ne pas rester confiné dans sa patrie : pouvant être le premier, il ne sera pas le second. Alors, il jette les yeux