Page:Mommsen - Histoire romaine - Tome 2.djvu/18

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
14
LIVRE II, CHAP. I

et ne conservait qu’un titre nu et pour la forme (V. supra, p. 6). La division des pouvoirs religieux et civil, le nouveau grand prêtre placé presque sur le pied d’un haut magistrat, contrairement à toutes les traditions anciennes, sont assurément les plus remarquables et les plus importantes des innovations apportées par une révolution, dont le but manifeste était la limitation des pouvoirs publics, dans un intérêt tout d’aristocratie. De plus, il semble qu’en même temps, les avis donnés par les augures et autres, d’après le vol des oiseaux ; les prodiges et autres phénomènes, aient chaque jour acquis davantage un caractère et une force obligatoires. Le consul qui aurait convoqué le peuple malgré l’augure, ou consacré un temple malgré les pontifes, n’aurait plus commis seulement un acte impie, il aurait fait un acte nul.

Le consul, en dernier lieu, ne marchait plus comme le roi, environné du respect et de la crainte : il n’avait plus ni le prestige du nom royal, ni celui de la consécration sacerdotale : les haches, on l’a vu, avaient été enlevées à ses licteurs : enfin, au lieu de la toge de pourpre des rois, il ne portait plus, pour se distinguer des autres citoyens, qu’une toge à simple bordure rouge [trabœa]. Les rois ne se montraient guère en public que montés sur leur char : les consuls durent subir la loi commune, et marcher à pied dans la ville comme le premier venu.

Le Dictateur.Mais les restrictions apportées aux pouvoirs et aux insignes de l’autorité suprême, n’atteignirent que le magistrat ordinaire. Nous avons dit déjà que, dans les cas extraordinaires, les deux consuls élus cédaient la place à un magistrat unique, le maître du peuple ou le dictateur (magister populi, dictator). Le peuple n’avait point part à son choix, dont les seuls consuls avaient le privilège. L’appel de ses décisions n’avait lieu, comme au temps des rois, que quand il l’avait autorisé. Dès qu’il