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LIVRE II, CHAP. III

peuple par l’élection aux dignités curules. Sans offrir une ressemblance complète avec le système représentatif des temps modernes et le self-government populaire, la constitution romaine s’en rapprochait toutefois ; et les sénateurs muets apportaient au gouvernement le concours si nécessaire, et pourtant si difficile à assurer, d’une masse compacte de votants silencieux, en état et en droit de juger les motions placées à l’ordre du jour.

Ses attributions.Les attributions du sénat ne furent point modifiées, pour ainsi dire. Il se garda bien de donner ouverture à l’opposition ou aux ambitieux, soit par des changements impopulaires, soit par des violations trop manifestes de la constitution, et, sans provoquer de lui-même l’extension des droits politiques du peuple dans le sens de la démocratie, il laissa cette extension s’accomplir. Mais si le peuple avait conquis les apparences du pouvoir, le sénat en avait conquis la réalité : son influence était prépondérante en matière de législation, d’élection et de gouvernement.

Son influence législative.Tout projet de loi devait d’abord lui être soumis : il était rare qu’un fonctionnaire osât porter une motion devant le peuple, sans son assentiment, ou contrairement à son avis. Que, s’il l’avait fait, les sénateurs pouvaient recourir à l’intercession des autres fonctionnaires, à la cassation sacerdotale, et à toute une série de moyens de nullité, pour étouffer la motion dès le début ou l’écarter à la longue. Enfin, comme le pouvoir exécutif résidait dans ses mains, le sénat était maître d’exécuter ou non le plébiscite voté malgré lui. Plus tard encore, le peuple l’y autorisant par son silence, il s’arrogea le droit de dispense légale dans les cas urgents, et sous réserve de la ratification ultérieure du peuple ; réserve peu sérieuse dès le commencement, et qui dégénéra en clause de style ; si bien que, dans les temps ultérieurs,