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LES INSTITUTIONS PRIMITIVES DE ROME

fants de la fille en sont exclus, bien entendu, dès qu’elle est passée, par le mariage, dans la maison d’un autre homme ; ou quand, procréés en dehors du légitime mariage, ils n’appartiennent à aucune famille. Une maison, des enfants, voilà, pour le citoyen romain, le but et l’essence de la vie. La mort n’est point un mal, puisqu’elle est nécessaire ; mais que la maison ou la descendance périsse, voilà un vrai malheur. On l’empêchera à tout prix, dès les premiers temps, en donnant à l’homme sans enfants le moyen d’en aller solennellement chercher dans le sein d’une famille étrangère, et de les faire siens en présence du peuple. La famille romaine, ainsi constituée, portait en elle-même, grâce à cette subordination morale puissante de tous ses membres, les germes d’une civilisation féconde dans l’avenir. Un homme seul peut en être le chef : la femme, sans doute, peut aussi bien que lui acquérir et posséder la terre et l’argent : la fille a dans l’héritage une part égale à celle de son frère ; la mère hérite aussi sur le même pied que les enfants. Mais cette femme ne cesse jamais d’appartenir à la maison : elle n’appartient point à la cité ; et, dans sa maison, elle a toujours un maître, le père, quand elle est la fille ; le mari, quand elle est l’épouse[1] ; son plus proche agnat mâle, quand elle n’a plus son

  1. Et il n’en est point ainsi seulement au cas où le mariage a été consommé suivant l’ancien rite (matrimonium confarreotione), quand il a eu lieu dans la forme purement civile (matrimonium consensu). Dans le mariage consensuel le mari acquérait de même un droit de propriété sur sa femme ; aussi, ce mariage a-t-il emprunté tout d’abord les principes et les pratiques des modes d’acquérir ordinaires, l’achat et la tradition formelle (coemptio) ou la prescription (usus). Quand il y avait eu consentement simple, sans l’acquisition de la puissance conjugale ; au cas, par exemple, où le temps voulu pour prescrire n’était point encore atteint, la femme n’était point épouse (uxor) ; elle était seulement tenue pour telle (pro uxore), absolument comme au cas de la causæ probatio, sous une loi postérieure (loi Ælia Sentia, v. Gaius, I. 29-66). Uxor tantummodo habebatur, dit Cicéron (Top. 3, 14) ; et cette règle s’est maintenue jusqu’aux temps brillants de la jurisprudence.