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LES COMMENCEMENTS DE ROME

mœurs, que le furent plus tard les Romains et les Samnites, une tribu sabellique quelconque est entrée dans le sein d’une communauté latine. En outre, comme d’après les données de leur tradition la plus ancienne et la plus vraisemblable, les Titiens ont maintenu leur existence indépendante en face des Ramniens, il faut croire qu’ils ont obligé ceux-ci à subir leur cohabitation (synœcisme). À ce point de vue, nous en convenons, il y a eu là mélange de deux nationalités, mais mélange superficiel, et dont, quelques siècles plus tard, l’établissement à Rome du Sabin Attus Clauzus (ou Appus Claudius), suivi de sa nombreuse clientèle, rappellera la forme et les conditions. Ni l’accueil fait aux Titiens parmi les Ramniens, ni le droit de cité donné aux Claudiens dans Rome, ne peuvent permettre de classer les Romains parmi les peuples de sang mêlé. À l’exception de quelques détails introduits dans le cérémonial religieux, vous ne trouvez nulle part chez eux les manifestations de l’élément sabellique : rien enfin dans la langue latine ne révèle l’atteinte sérieuse qu’elle en aurait dû recevoir dans une telle hypothèse[1]. Il serait étonnant, répétons le, que l’introduction parmi les Latins d’une seule tribu non latine ait suffi pour altérer d’une façon sensible le caractère national. Ajoutons aussi, car il ne faut point oublier ce fait, qu’au temps où les Titiens sont venus se fixer à côté des Ramniens, la nationalité latine avait le

  1. Aujourd’hui que l’on a de tous côtés abandonné l’ancienne opinion suivant laquelle l’idiome latin n’eût été qu’un mélange du grec avec d’autres idiomes, il s’est encore rencontré des savants éclairés pourtant (sic, Schwegler, Rœm. Gesch. (Hist. Rom.), I, 184, 193) selon lesquels la langue des Romains se serait formée du mélange de deux dialectes italiens, rapprochés d’abord par une mutuelle affinité. Mais, pour croire à ce phénomène, il faudrait en trouver la raison dans les nécessités philologiques ou historiques. Or, cette preuve nous la cherchons en vain. Et puis, quand une langue se fait mixte, et exprime la fusion de deux autres langues, il n’est point de philologue qui ne le sache, cela peut tenir autant à un certain développement organique qu’à un mélange purement extérieur.