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LIVRE I, CHAPITRE II

du bien-être, souvent même la jouissance du doux loisir : leur système politique consiste à approfondir chaque jour au profit du canton ou de la tribu, le fossé séparatif du particularisme primitif ; à dissoudre même dans chaque localité tous les éléments du pouvoir municipal. Dans la religion ils font des hommes de leurs dieux ; puis bientôt ils les nient : ils laissent à l’enfant toujours nu le libre jeu de ses membres ; à la pensée humaine, l’indépendance absolue d’un essor majestueux, parfois même effrayant. Les Romains au contraire garrottent le fils dans la crainte du père, le citoyen dans la crainte du chef de l’État, et eux tous dans la crainte des dieux ; ils ne veulent rien, n’honorent rien que les actes qui sont utiles. Pour le citoyen, tous les instants de sa courte vie doivent être remplis par un travail sans relâche. Chez les Romains, dès le plus bas âge, d’amples vêtements doivent voiler et protéger la chasteté du corps ; c’est être mauvais citoyen que de vouloir vivre autrement que tous les citoyens. Chez eux enfin l’État est tout, et la seule haute pensée permise est celle de l’agrandissement de l’État. Certes, il est difficile, après tant de contrastes, de remonter jusqu’aux souvenirs de l’unité primitive, où les deux peuples un instant confondus avaient puisé les éléments de leur civilisation postérieure. Bien téméraire serait celui qui essayerait de lever ces voiles. Nous esquisserons pourtant en quelques mots les commencements de la nationalité italique, et les traits par où elle se rattache à l’époque plus ancienne ; non point tant pour abonder dans les idées préconçues du lecteur, que pour lui montrer du doigt la direction à suivre.

La famille et l’État.L’élément patriarcal dans l’État, ou ce qui peut s’appeler de ce nom, repose en Grèce et en Italie sur les mêmes fondements. Et tout d’abord, le régime conjugal y est institué selon les règles de l’honnête et de la loi