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LIVRE I, CHAP. XIV

des sons, au milieu des combinaisons infinies de l’histoire. Création puissante du génie humain, ce même alphabet a été l’œuvre commune des Araméens et des Indo-Européens. Dans la famille des langues sémitiques, où les voyelles ne jouent qu’un rôle secondaire, et n’apparaissent jamais au commencement des mots, l’individualisation des consonnes devient par cela même plus aisée ; aussi est-ce là qu’a été inventé le premier alphabet, sans voyelles, il est vrai. Puis sont venus les Indiens et les Grecs qui, apportant chacun les inventions bien diverses de leur génie, ont remanié sur le canevas de l’écriture araméenne certaines consonnes que le commerce leur avait fait connaître, et ont complété l’alphabet, en y ajoutant les voyelles ou en complétant les syllabes. Euripide précise bien leur œuvre lorsqu’il fait dire à Palamède : « J’ai porté remède à l’oublieux passé, quand je plaçai dans les mots les syllabes muettes ou résonnantes, et quand j’inventai pour les mortels la science de l’écriture ! »

L’alphabet araméen-hellénique fut ensuite importé en Italie ; et cela à une date fort reculée ; mais avant, il avait reçu en Grèce des perfectionnements notables par l’addition des trois lettres nouvelles ξ, φ, χ ; et par les changements apportés aux signes γ, ι, λ (p. 185, note 1). Nous avons déjà dit ailleurs (p. 270) que deux alphabets grecs ont à vrai dire pénétré en Italie, l’un avec le double s (le sigma, ς, et le san, sch), le k simple, et l’ancienne forme P (r), fut suivi en Étrurie ; l’autre avec l’s simple, le double k (le kappa, et le koppa, q), et la forme plus récente r, prédomina chez les Latins. L’écriture étrusque primitive n’est pas disposée en ligne ; elle décrit des contours et serpente : une autre plus nouvelle va de droite à gauche en lignes parallèles inégales. L’écriture latine, au contraire, si loin que l’on remonte dans l’étude des monuments, suit la même disposition, mais