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L’AGRICULTURE, L’INDUSTRIE ET LE COMMERCE

helléniques, ou au contraire les peuples italiques la possédaient-ils dès l’origine ? Je ne le déciderai pas (p. 26). À l’appui de cette dernière opinion, on relève ce fait, que l’une des fêtes du vin (vinalia), celle qui plus tard tombait le 23 avril, et s’appelait la fête de l’ouverture des tonneaux, était dédiée au pater Jovis, à Jupiter, et non au dieu du vin, pater Lyœus, postérieurement emprunté à la Grèce. Selon une fort ancienne légende, Mézence, roi des Cœrites, fit payer un tribut de vin aux Latins ou aux Rutules. Suivant une version généralement répandue, et commentée en sens divers dans toute la Péninsule, les Celtes ayant eu connaissance des récoltes et des fruits exquis, des fruits de la grappe surtout, produits par la terre d’Italie, il n’en aurait pas fallu davantage pour les pousser à franchir les Alpes. À ne pas les prendre trop au sérieux, ces traditions attestent du moins que les Latins étaient fiers de leurs richesses vinicoles, et que leurs voisins les leur enviaient. On voit aussi, dès les plus anciens temps, les prêtres exercer sur ces cultures une surveillance assidue. À Rome, la vendange ne commence que sous l’autorisation du plus grand des prêtres de la cité, du flamine de Jupiter, qui lui-même y met le premier la main. De même le droit sacré des Tusculans défend de mettre le vin nouveau en vente, tant que le prêtre n’a pas solennellement purifié « l’ouverture des tonneaux[1]. » Citons encore les libations et le vin si fréquemment versé dans le rituel des sacrifices, et surtout la loi bien connue de Numa, qui défend au prêtre romain de présenter en breuvage aux dieux le vin provenant de grappes non coupées ; disposition analogue à celle qui, pour favoriser l’usage de la dessiccation des grains, prohibe l’offrande des céréales fraîches.

  1. [Nous nous servons du mot impropre de tonneau : mais chacun sait que les vieux Romains mettaient leur vin dans des vases de poterie fermés ; calpar, cupa.]