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LES HELLÈNES, L’EMPIRE DES MERS

Rapports entre les Italiques occidentaux et les Grecs.Il ne faut pas douter en revanche, que la côte occidentale, au nord du Vésuve, n’ait été fort anciennement visitée par les Hellènes, et qu’il n’y ait été créé des comptoirs sur les promontoires et dans les îles. Nous avons, tout d’abord, un témoignage précieux de ce fait dans la légende d’Ulysse, qui place les aventures de son héros, non loin des plages tyrrhéniennes[1]. On croyait retrouver les îles d’Éole, dans le groupe de Lipari ; l’île de Calypso, près du promontoire Lacinien [île d’Ogygie] ; l’île des Sirènes, près du cap Misène ; l’île de Circé, près du cap Circéien [maintenant Circeo] ; le tombeau élevé d’Elpénor, au sommet de la roche escarpée de Terracine. Les Lestrigons habitaient près de Caïéta et de Formies [Gaëte, et Mola di Gaeta]. Les deux fils qu’Ulysse avait eus de Circé, Agrios (c’est-à-dire le sauvage), et Latinos, régnaient sur les Tyrrhéniens « dans le coin le plus reculé de l’île sacrée. » Une autre version, plus récente, mentionne Latinus, l’unique fils d’Ulysse et de Circé, et Ausone, fils d’Ulysse et de Calypso. Ne sont-ce point là de vieux contes rapportés par ces marins d’Ionie, que l’image de la douce patrie avait accompagnés jusque dans les mers tyrrhéniennes ? L’imagination vive et brillante qui se joue dans le cycle poétique de l’Odyssée ionienne, mettait le sceau à la légende, en en transportant le théâtre dans les environs de Cymé et dans tous les parages fréquentés par la marine cyméenne. Ces indices d’anciennes expéditions helléniques ne sont pas les seuls. On en rencontre d’autres encore dans le

  1. Les plus anciens écrivains grecs qui fassent mention des aventures d’Ulysse dans les mers tyrrhéniennes, sont : l’auteur de la Théogonie hésiodique, dans l’une de ses plus anciennes parties ; puis ceux qui viennent un peu avant le siècle d’Alexandre, tels qu’Éphore, de qui procède le soi-disant Scymnus, et le soi-disant Scylax. Le premier de ces monuments appartient à un siècle où les Grecs ne voyaient dans l’Italie qu’un vaste archipel ; il est dès lors très-vieux et permet, à bon droit, de faire remonter jusqu’au temps des rois Romains la formation de cette légende ulyssienne.