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LIVRE I, CHAP. X

sauf le petit établissement de la Corcyra Melœna [Corcyra Nigra, aujourd’hui Curzola], datant de 580 av. J.-C.174 environ, il n’y a plus rien. Quelle fut la raison de cette abstention ? c’est ce dont on n’a pu bien se rendre compte. La nature elle-même semblait appeler les Hellènes dans ces contrées : les routes du commerce s’y étaient depuis longtemps ouvertes à la marine corinthienne, à celle de Corcyre [Kerkyra, Corfou], colonie presque contemporaine de la fondation de Rome (vers 710 av. J.-C.44). Les villes placées aux bouches du Pô, Spina, Hatria, étaient des entrepôts importants. Les orages de l’Adriatique, les dangers de la côte inhospitalière, la sauvagerie des Illyriens barbares, ne sauraient suffire pour expliquer une telle singularité. Quoi qu’il en soit, ce fut pour l’Italie un événement de haute importance que de recevoir l’élément civilisateur par la région de l’Ouest, et non immédiatement par sa côte orientale. En même temps, la dorienne Tarente, la plus orientale des places de la Grande-Grèce, entra en concurrence, dans ces parages, avec Corinthe et Corcyre : et par la possession d’Hydrus (Hydruntum, Otranto), elle commanda l’entrée de l’Adriatique, du côté italien. Comme, à l’exception des havres du Pô, il n’y avait pas alors, dans toute la longueur de l’Adriatique, un seul marché méritant ce nom (les succès d’Ancône commencent plus tard, et bien plus tard encore ceux de Brundisium. [Brindisi, Brindes]), on comprend que le plus souvent les navires d’Epidamne et d’Apollonie allaient aussi atterrir à Tarente. Enfin, les Tarentins avaient ouvert avec l’Apulie des relations assez suivies par voie de terre, et il faut leur attribuer les quelques éléments de civilisation grecque qui avaient pu pénétrer dans la région du sud-est. Mais, à cette heure, ces éléments sont à l’état de germes seulement ; ils ne se développeront que dans les siècles postérieurs.