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LES INSTITUTIONS PRIMITIVES DE ROME

devant la loi régnait pleine et entière. Nul peuple peut-être n’a poussé aussi loin que les Romains, la rigueur des deux principes. Cherche-t-on une marque nouvelle et éclatante de l’exclusivité du droit de cité, on la trouvera dans l’institution toute primitive des citoyens honoraires, institution destinée pourtant à concilier les deux extrêmes. Lorsqu’un étranger était admis, par le vote du peuple, dans le sein de la cité[1], il avait la faculté d’abandonner son droit de citoyen dans sa patrie, auquel cas il entrait avec tous les droits actifs dans la cité romaine, ou de joindre seulement la cité qui lui était conférée à celle dont il était déjà pourvu ailleurs. L’honorariat est un ancien usage pratiqué de même et de tout temps en Grèce, où l’on a vu, jusque fort tard, le même homme citoyen de plusieurs villes. Mais le sentiment national était trop puissant, trop exclusif dans le Latium, pour qu’une telle latitude y fût laissée au membre d’une autre cité. Là, si le nouvel élu n’abandonnait pas son droit actif dans sa patrie, l’honorariat qui venait de lui être conféré n’avait plus qu’un caractère purement nominal : il équivalait simplement aux franchises d’une hospitalité amicale, à un droit à la protection romaine, telle qu’elle avait été de tout temps concédée à des étrangers. Ainsi fermée du côté du dehors, la cité plaçait sur la même ligne tous les membres qui lui appartenaient, nous venons de le dire. On sait que les différences existant à l’intérieur de la famille, quoique souvent elles persistassent encore au dehors, devaient pleinement s’effacer au regard des droits de citoyen ; que tel fils, regardé dans la maison comme sien, par son père, pouvait être appelé à lui commander dans l’ordre politique. Il n’y avait point

  1. L’expression la plus ancienne, pour désigner ce vote, est patronum cooptari ; laquelle, les mots patronus et patricius étant synonymes et s’appliquant au droit complet du citoyen (p. 85), veut dire la même chose que les expressions in patres, in patricios cooptari (Tit. Liv. IV, 4. Suét. Tiber. 1) ; ou que celle plus récente in patricios adlegi.