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LIVRE I, CHAP. V

tution l’avaient faite, diffère essentiellement de la souveraineté chez les modernes : de même qu’on ne trouve chez ceux-ci rien qui ressemble à la famille et à la cité romaines.

Le Sénat.À cette puissance absolue que nous venons de dépeindre, la coutume et les mœurs opposèrent pourtant une barrière sérieuse. Comme fait le père de famille chez lui, le roi, en vertu d’une règle reconnue, ne prend pas de décision dans les circonstances graves, sans s’éclairer du conseil d’autres citoyens. Le conseil de famille est un pouvoir modérateur pour le père et l’époux : le conseil des amis, dûment convoqué, influe par son avis sur le parti qui sera adopté par le magistrat suprême. C’est là un principe constitutionnel en pleine vigueur sous la royauté, comme sous les régimes venus après elle. L’assemblée des amis du Roi, rouage désormais important dans l’ordre politique, ne fait pas pourtant obstacle légal au pouvoir illimité dont le représentant l’interroge en certaines graves occurrences. Elle n’a point à intervenir dans les choses touchant à la justice ou au commandement de l’armée. Elle est un conseil politique : le Conseil des anciens, le Sénat (Senatus). Mais le roi ne choisit pas les amis, les affidés qui le composent : corps politique institué pour durer toujours, le Sénat, dès les premiers temps, a le caractère d’une véritable assemblée représentative. Les gentes romaines, quand elles nous apparaissent dans les documents d’une histoire bien moins ancienne que le temps des rois, n’ont plus leur chef à leur tête : nul père de famille ne représente au-dessus d’elles ce patriarche, souche commune de chaque groupe de familles, de qui tous les gentiles mâles descendent ou croient être descendus. Mais à l’époque où nous sommes, lorsque l’État se formait de la réunion de toutes les gentes, il n’en était point ainsi : chacune d’elles avait son chef dans l’Assemblée des anciens. Aussi voit-on plus tard les sénateurs se