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INGRES.

sa doctrine et sa vie que de voir en lui le dernier des maîtres de la lignée classique, et de le rendre responsable de tous les veules néo-grecs, de tous les adeptes de l’Académisme qui se réclament de son nom. Après la mort du maître, il s’était passé une chose étrange dans le monde de la critique artistique. D’une lamentable ignorance et d’une légèreté sans exemples, elle crut qu’il lui était impossible de louer Delacroix, le maître à la mode, sans traîner son rival dans la boue. Alors, prenant pour des faits les fables les plus grossières, coupant dans les œuvres de Guizot des jugements très durs sur le compte de Louis David, et les appliquant à Ingres, sans vouloir se douter du quiproquo ; s’emparant même d’inoffensifs jeux de mots qu’elle prit, ou feignit de prendre, pour des arguments sérieux, elle se mit à détruire consciencieusement la gloire d’Ingres, et y réussit au delà de toute croyance. Les dernières traces de cette œuvre d’ignorance et de mauvaise foi n’ont pas encore disparu. Pendant que s’accomplissait cette mauvaise action, les peintres, moins préoccupés de théories littéraires que d’œuvres subjectives, étudiaient en silence celles du maître tombé et en faisaient leur profit. En même temps, des travailleurs, indépendants de toutes les coteries, exhumaient l’histoire du réformateur du tas incroyable de légendes absurdes sous lesquelles elle disparaissait, publiaient des documents originaux et mettaient au jour les dessins et les écrits légués par Ingres au musée de sa ville natale. Le moment était venu où une cri-