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LÉLIE

Que puis-je donc pour toi ?

MASCARILLE

Que puis-je donc pour toi ? C’est que de votre père
Il faut absolument apaiser la colère.

LÉLIE

Nous avons fait la paix.

MASCARILLE

Nous avons fait la paix.Oui, mais non pas pour nous.
Je l’ai fait ce matin mort pour l’amour de vous ;
La vision le choque, et de pareilles feintes
Aux vieillards comme lui sont de dures atteintes
Qui, sur l’état prochain de leur condition,
Leur font faire à regret triste réflexion.
Le bonhomme, tout vieux, chérit fort la lumière,
Et ne veut point de jeu dessus cette matière ;
Il craint le pronostic, et, contre moi fâché,
On m’a dit qu’en justice il m’avait recherché ;
J’ai peur, si le logis du roi fait ma demeure,
De m’y trouver si bien dès le premier quart d’heure
Que j’aie peine aussi d’en sortir par après
Contre moi dès longtemps l’on a force décrets ;
Car enfin la vertu n’est jamais sans envie,
Et dans ce maudit siècle est toujours poursuivie.
Allez donc le fléchir.

LÉLIE

Allez donc le fléchir.Oui, nous le fléchirons :
Mais aussi tu promets…

MASCARILLE

Mais aussi tu promets…Ah ! Mon Dieu ! nous verrons.

(Lélie sort.)