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LÉLIE

Quoi ?

LÉANDRE

Quoi ? Votre procédé de l’un à l’autre bout.

LÉLIE

C’est de l’hébreu pour moi, je n’y puis rien comprendre.

LÉANDRE

Feignez, si vous voulez, de ne me pas entendre ;
Mais, croyez-moi, cessez de craindre pour un bien
Où je serais fâché de vous disputer rien :
J’aime fort la beauté qui n’est point profanée,
Et je ne veux point brûler pour une abandonnée.

LÉLIE

Tout beau, tout beau, Léandre.

LÉANDRE

Tout beau, tout beau, Léandre.Ah ! que vous êtes bon !
Allez, vous dis-je encor, servez-la sans soupçon,
Vous pourrez vous nommer homme à bonnes fortunes :
Il est vrai, sa beauté n’est pas des plus communes ;
Mais en revanche aussi le reste est fort commun.

LÉLIE

Léandre, arrêtons là ce discours importun.
Contre moi tant d’efforts qu’il vous plaira pour elle ;
Mais, surtout, retenez cette atteinte mortelle :
Sachez que je m’impute à trop de lâcheté
D’entendre mal parler de ma divinité,
Et que j’aurai toujours bien moins de répugnance
À souffrir votre amour qu’un discours qui l’offense.