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XIX MOLIÈRE ET LA COMÉDIE

Il faut sans doute estimer le grand sens de ce vieillard qui, à la représentation des Précieuses, cria du milieu du parterre : Courage, Molière ! voilà la bonne comédie. Mais, en vérité, j’admire Ménage, qui en sortant dit à Chapelain : Monsieur, nous admirions, vous et moi, toutes les sottises qui viennent d’être si finement et si justement critiquées. Le mot de l’homme du parterre n’était que le suffrage de la raison ; l’autre était le sacrifice de l’amour-propre et le plus grand triomphe de la vérité. U École des Maris fut le premier pas qu’il fit dans la science de l’intrigue. C’est une pièce parfaitement intriguée, où le jaloux est dupé sans être un sot, où la finesse réussit parce qu’elle ressemble à la bonne foi, et où celui qu’on trompe n’est jamais plus heureux que lorsqu’il est trompé. Boccace et d’Ouville en ont fourni les situations principales ; mais ce qu’on emprunte d’un conte diminue seulement le mérite de l’invention sans ôter rien au mérite de l’ensemble dramatique, dont la difficulté est sans comparaison plus grande. De plus, il y a ici, ce qui alors n’était pas plus connu, de la morale et des caractères.

UÉcole des Femmes n’est pas moins instructive : la conduite n’en est pas si régulière, mais le comique en est plus fort. V

Le Mariage forcé, comédie-ballet en un acte, était encore un de ces intermèdes bouffons qui faisaient partie des spectacles de la cour. On l’appela le Ballet du Roi, parce que Louis XIV y dansa. Le principal rôle est un Sgnanarelle, nom qui désignait, dans les anciennes farces, un personnage imbécile ou grotesque. Il n’y a aucune intrigue dans la pièce ; mais, accoutumé à placer partout la critique des mœurs, Molière se moque ici du verbiage scientifique que les pédants de l’école avaient conservé, quoiqu’il fût passé de mode partout ailleurs ; et il joue dans les deux docteurs, Pancrace et Marphurius, la manie de philosopher hors de propos, la morgue de la science, et la sottise du phyrrhonisme. La fureur de Pancrace à propos de la forme du chapeau n’était point un tableau chargé, dans un temps où l’on rendait encore des arrêts en faveur d’Aristote ; et, quand Sganarelle donne des coups de bâton au pyrrhonien Marphurius, en lui représentant que, selon sa doctrine, il ne doit pas être sûr que ce soient des coups de bâton, il se sert d’un argument proportionné à la folie de cette doctrine.

C’est malgré lui que Molière fit le Festin de Pierre. Ce vieux