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Pardonnez-moi ; mais j’ai certaine cause
Qui me fait demander ce récit entre nous.

Alcmène.

Les soucis importants qui vous peuvent saisir,
Vous ont-ils fait si vite en perdre la mémoire ?

Amphitryon.

Peut-être ; mais enfin vous me ferez plaisir
De m’en dire toute l’histoire.

Alcmène.

L’histoire n’est pas longue. À vous je m’avançai,
Pleine d’une aimable surprise ;
Tendrement je vous embrassai,
Et témoignai ma joie à plus d’une reprise.

Amphitryon, en soi-même.

Ah ! d’un si doux accueil je me serais passé.

Alcmène.

Vous me fîtes d’abord ce présent d’importance,
Que du butin conquis vous m’aviez destiné.
Votre cœur, avec véhémence,
M’étala de ses feux toute la violence,
Et les soins importuns qui l’avaient enchaîné,
L’aise de me revoir, les tourments de l’absence,
Tout le souci que son impatience
Pour le retour s’était donné ;
Et jamais votre amour, en pareille occurrence,
Ne me parut si tendre et si passionné.

Amphitryon, en soi-même.

Peut-on plus vivement se voir assassiné ?

Alcmène.

Tous ces transports, toute cette tendresse,
Comme vous croyez bien, ne me déplaisaient pas ;
Et s’il faut que je le confesse,
Mon cœur, Amphitryon, y trouvait mille appas.

Amphitryon.

Ensuite, s’il vous plaît.

Alcmène.

Ensuite, s’il vous plaît. Nous nous entrecoupâmes