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Et qui, sans rien exagérer,
Par tous les emplois qu’il me donne,
Aurois besoin, plus que personne,
D’avoir de quoi me voiturer.

La Nuit.

Que voulez-vous faire à cela ?
Les poëtes font à leur guise :
Ce n’est pas la seule sottise
Qu’on voit faire à ces messieurs-là.
Mais contre eux toutefois votre ame à tort s’irrite,
Et vos ailes aux pieds sont un don de leurs soins.

Mercure.

Oui ; mais pour aller plus vite,
Est-ce qu’on s’en lasse moins ?

La Nuit.

Laissons cela, seigneur Mercure
Et sachons ce dont il s’agit.

Mercure.

C’est Jupiter, comme je vous l’ai dit,
Qui de votre manteau veut la faveur obscure,
Pour certaine douce aventure
Qu’un nouvel amour lui fournit.
Ses pratiques, je crois, ne vous sont pas nouvelles :
Bien souvent pour la terre il néglige les cieux ;
Et vous n’ignorez pas que ce maître des dieux
Aime à s’humaniser pour des beautés mortelles,
Et sait cent tours ingénieux
Pour mettre à bout les plus cruelles.
Des yeux d’Alcmène il a senti les coups ;
Et tandis qu’au milieu des béotiques plaines
Amphitryon, son époux,
Commande aux troupes thébaines,
Il en a pris la forme, et reçoit là-dessous
Un soulagement à ses peines,
Dans la possession des plaisirs les plus doux.
L’état des mariés à ses feux est propice :
L’hymen ne les a joints que depuis quelques jours ;
Et la jeune chaleur de leurs tendres amours