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Scène IV.

HARPAGON, CLÉANTE, MAÎTRE JACQUES.
Maître Jacques

Hé ! hé ! hé ! Messieurs, qu’est-ce ci ? à quoi songez-vous ?

Cléante

Je me moque de cela.

Maître Jacques, à Cléante.

Ah ! Monsieur, doucement.

Harpagon

Me parler avec cette impudence !

Maître Jacques, à Harpagon.

Ah ! monsieur, de grâce !

Cléante Je n’en démordrai point.

Maître Jacques, à Cléante.

Hé quoi ! à votre père ?

Harpagon

Laisse-moi faire.

Maître Jacques, à Harpagon.

Hé quoi ! à votre fils ? Encore passe pour moi.

Harpagon

Je te veux faire toi-même, maître Jacques, juge de cette affaire, pour montrer comme j’ai raison[1].

Maître Jacques

J’y consens. (À Cléante.) Éloignez-vous un peu.

Harpagon

J’aime une fille que je veux épouser ; et le pendard a l’insolence de l’aimer avec moi, et d’y prétendre malgré mes ordres.

Maître Jacques

Ah ! il a tort.

Harpagon

N’est-ce pas une chose épouvantable, qu’un fils qui veut entrer en concurrence avec son père ? et ne doit-il pas, par respect, s’abstenir de toucher à mes inclinations ?

Maître Jacques

Vous avez raison. Laissez-moi lui parler, et demeurez là.

Cléante, à maître Jacques, qui s’approche de lui.

Eh bien ! oui, puisqu’il veut te choisir pour juge, je n’y

  1. Cette scène rappelle la scène septième du premier acte, où Harpagon a pris Valère pour juge entre sa fille et lui.