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TROISIÈME INTERMÈDE[1].

C’est une cérémonie burlesque d’un homme qu’on fait médecin, en récit, chant, et danse. Plusieurs tapissiers viennent préparer la salle, et placer les bancs en cadence. En suite de quoi, toute l’assemblée, composée de huit porte-seringues, six apothicaires, vingt-deux docteurs, et celui qui se fait recevoir médecin, huit chirurgiens dansants, et deux chantants, entrent, et prennent place, chacun selon son rang[2].

PREMIÈRE ENTRÉE DE BALLET.
præses.

          Savantissimi doctores,
          Medicinæ professores,
          Qui hic assemblati estis ;
          Et vos, altri messiores,
          Sententiarum Facultatis
          Fideles executores,
        Chirurgiani et apothicari,

  1. Les parties nouvelles qui se trouvent ici reproduites pour la première fois dans notre édition de Molière, ont été retrouvées et signalées par M. Magnin, dans un curieux article intitulé : Quelques pages à ajouter aux Œuvres de Molière. Revue des Deux Mondes, 1er février 1846. Elles sont placées entre crochets.
  2. Cette réception bouffonne fut une plaisanterie de société, imaginée dans un souper chez madame de La Sablière, où La Fontaine et Despréaux étaient avec Molière. (Aimé Martin.)

    Il est probable qu’en composant cet intermède, Molière s’est rappelé les détails des cérémonies alors en usage pour la réception des médecins, et dont il avait dû être témoin pendant son séjour à Montpellier. Ici le badinage ne surpasse guère la vérité. Nous citerons à l’appui de cette opinion un passage fort curieux de Locke à Montpellier, en 1676, trois ans après la mort de Molière ; il est ainsi conçu : « Recette pour faire un docteur en médecine. Grande procession de docteurs habillés de rouge, avec des toques noires ; dix violons jouant des airs de Lulli. Le président s’assied, fait signe aux violons qu’il veut parler, et qu’ils aient à se taire, se lève, commence son discours par l’éloge de ses confrères, et le termine par une diatribe contre les innovations, et la circulation du sang. Il se rassied. Les violons recommencent. Le récipiendaire prend la parole, complimente le chancelier, complimente les professeurs, complimente l’académie. Encore les violons. Le président saisit un bonnet qu’un huissier porte au bout d’un bâton, et qui a suivi processionnellement la cérémonie, coiffe le nouveau docteur, lui met au doigt un anneau, lui serre les reins d’une chaîne d’or, et le prie poliment de s’asseoir. Tout cela m’a fort peu édifié. » (Life of Locke, by lord King.) (Aimé Martin.)