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se remarient, et de quel œil ils ont coutume de regarder ce qu’on appelle belle-mère. Mais si vous souhaitez que je perde le souvenir de votre dernière fredaine, je vous recommande surtout de régaler d’un bon visage cette personne-là, et de lui faire enfin tout le meilleur accueil qu’il vous sera possible.

Cléante

À vous dire le vrai, mon père, je ne puis pas vous promettre d’être bien aise qu’elle devienne ma belle-mère. Je mentirois, si je vous le disois ; mais, pour ce qui est de la bien recevoir et de lui faire bon visage, je vous promets de vous obéir ponctuellement sur ce chapitre.

Harpagon

Prenez-y garde au moins.

Cléante

Vous verrez que vous n’aurez pas sujet de vous en plaindre.

Harpagon

Vous ferez sagement.


Scène V.

HARPAGON, VALÈRE, MAÎTRE JACQUES.
Harpagon

Valère, aide-moi à ceci. Or çà, maître Jacques, approchez-vous, je vous ai gardé pour le dernier.

Maître Jacques

Est-ce à votre cocher, Monsieur, ou bien à votre cuisinier, que vous voulez parler ? car je suis l’un et l’autre.

Harpagon

C’est à tous les deux.

Maître Jacques

Mais à qui des deux le premier ?

Harpagon

Au cuisinier.

Maître Jacques

Attendez donc, s’il vous plaît.

Maître Jacques ôte sa casaque de cocher, et paraît vêtu en cuisinier.
Harpagon

Quelle diantre de cérémonie est-ce là ?

Maître Jacques

Vous n’avez qu’à parler.

Harpagon

Je me suis engagé, maître Jacques, à donner ce soir à souper.