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LES FEMMES SAVANTES.

Chrysale.
Fort bien. C’étoit, mon frère, un fort bon gentilhomme.

Ariste.
On le dit.

Chrysale.
On le dit. Nous n’avions alors que vingt-huit ans,
Et nous étions, ma foi, tous deux de verts galants.

Ariste.
Je le crois.

Chrysale.
Je le crois. Nous donnions chez les dames romaines,
Et tout le monde, là, parlait de nos fredaines :
Nous faisions des jaloux.

Ariste.
Nous faisions des jaloux. Voilà qui va des mieux ;
Mais venons au sujet qui m’amène en ces lieux.


Scène III.

Bélise, entrant doucement, et écoutant ; Chrysale, Ariste.

Ariste.
Clitandre auprès de vous me fait son interprète,
Et son cœur est épris des grâces d’Henriette.

Chrysale.
Quoi ! de ma fille ?

Ariste.
Quoi ! de ma fille ? Oui ; Clitandre en est charmé,
Et je ne vis jamais amant plus enflammé.

Bélise.
Non, non ; je vous entends. Vous ignorez l’histoire,
Et l’affaire n’est pas ce que vous pouvez croire.

Ariste.
Comment, ma sœur ?

Bélise.
Comment, ma sœur ? Clitandre abuse vos esprits ;
Et c’est d’un autre objet que son cœur est épris.

Ariste.
Vous raillez. Ce n’est pas Henriette qu’il aime ?

Bélise.
Non ; j’en suis assurée.