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Acte II, scène X.

Sylvestre, secouant rudement la main d’Argante.

Touchez là, touchez. Je vous donne ma parole, et vous jure sur mon honneur, par l’épée que je porte, par tous les serments que je saurois faire, qu’avant la fin du jour je vous déferai de ce maraud fieffé, de ce faquin d’Argante. Reposez-vous sur moi.

Scapin.

Monsieur, les violences en ce pays-ci ne sont guère souffertes.

Sylvestre.

Je me moque de tout, et je n’ai rien à perdre.

Scapin.

Il se tiendra sur ses gardes assurément ; et il a des parents, des amis et des domestiques, dont il se fera un secours contre votre ressentiment.

Sylvestre.

C’est ce que je demande, morbleu ! c’est ce que je demande. (Mettant l’épée à la main.) Ah, tête ! ah, ventre ! Que ne le trouvé-je à cette heure avec tout son secours ! Que ne paroît-il à mes yeux au milieu de trente personnes ! Que ne les vois-je fondre sur moi les armes à la main ! Comment ! marauds, vous avez la hardiesse de vous attaquer à moi ! Allons, morbleu, tue ! (Poussant de tous les côtés, comme s’il avoit plusieurs personnes à combattre.) Point de quartier. Donnons. Ferme. Poussons. Bon pied, bon œil. Ah ! coquins ! ah ! canaille ! vous en voulez par là ! je vous en ferai tâter votre soûl. Soutenez, marauds ; soutenez. Allons. À cette botte. À cette autre. (Se tournant du côté d’Argante et de Scapin.) À celle-ci. À celle-là. Comment, vous reculez ! Pied ferme, morbleu ; pied ferme !

Scapin.

Hé, hé, hé ! Monsieur, nous n’en sommes pas.

Sylvestre.

Voilà qui vous apprendra à vous oser jouer à moi.


Scène X.

ARGANTE, SCAPIN.
Scapin.

Hé bien ! vous voyez combien de personnes tuées pour deux cents pistoles. Or sus, je vous souhaite une bonne fortune.