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Les Fourberies de Scapin.

Scapin.

Des choses extravagantes.

Argante.

Mais encore ?

Scapin.

Il ne parlait pas moins que de cinq ou six cents pistoles.

Argante.

Cinq ou six cents fièvres quartaines qui le puissent serrer ! Se moque-t-il des gens ?

Scapin.

C’est ce que je lui ai dit. J’ai rejeté bien loin de pareilles propositions, et je lui ai bien fait entendre que vous n’étiez point une dupe, pour vous demander des cinq ou six cents pistoles. Enfin, après plusieurs discours, voici où s’est réduit le résultat de notre conférence. Nous voilà au temps, m’a-t-il dit, que je dois partir pour l’armée ; je suis après à m’équiper, et le besoin que j’ai de quelque argent, me fait consentir, malgré moi, à ce qu’on me propose. Il me faut un cheval de service, et je n’en saurois avoir un qui soit tant soit peu raisonnable, à moins de soixante pistoles.

Argante.

Hé bien ! pour soixante pistoles, je les donne.

Scapin.

Il faudra le harnais, et les pistolets ; et cela ira bien à vingt pistoles encore.

Argante.

Vingt pistoles, et soixante, ce seroit quatre-vingts.

Scapin.

Justement.

Argante.

C’est beaucoup ; mais, soit ; je consens à cela.

Scapin.

Il me faut aussi un cheval pour monter mon valet, qui coûtera bien trente pistoles.

Argante.

Comment diantre ! Qu’il se promène, il n’aura rien du tout.

Scapin.

Monsieur !

Argante.

Non, c’est un impertinent.