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Les Fourberies de Scapin.

de mille attraits, et ce n’étoit qu’agréments et que charmes que toute sa personne.

Scapin.

Je sens venir les choses.

Octave.

Si tu l’avois vue, Scapin, en l’état que je dis, tu l’aurois trouvée admirable.

Scapin.

Oh ! je n’en doute point ; et sans l’avoir vue, je vois bien qu’elle étoit tout à fait charmante.

Octave.

Ses larmes n’étoient point de ces larmes désagréables qui défigurent un visage ; elle avoit à pleurer une grâce touchante, et sa douleur étoit la plus belle du monde.

Scapin.

Je vois tout cela.

Octave.

Elle faisoit fondre chacun en larmes, en se jetant amoureusement sur le corps de cette mourante, qu’elle appeloit sa chère mère ; et il n’y avoit personne qui n’eût l’âme percée de voir un si bon naturel.

Scapin.

En effet, cela est touchant ; et je vois bien que ce bon naturel-là vous la fit aimer.

Octave.

Ah ! Scapin, un barbare l’auroit aimée.

Scapin.

Assurément. Le moyen de s’en empêcher ?

Octave.

Après quelques paroles, dont je tâchai d’adoucir la douleur de cette charmante affligée, nous sortîmes de là ; et demandant à Léandre ce qu’il lui sembloit de cette personne, il me répondit froidement qu’il la trouvoit assez jolie. Je fus piqué de la froideur avec laquelle il m’en parloit, et je ne voulus point lui découvrir l’effet que ses beautés avoient fait sur mon âme.

Sylvestre, à Octave.

Si vous n’abrégez ce récit, nous en voilà pour jusqu’à de-