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C’est une bagatelle de Sostrate, Madame, que je vous dirai une autre fois, quand vous ne serez point embarrassée.

ÉRIPHILE.

Ne me fais point languir davantage, te dis-je, et m’apprends cette nouvelle.

CLITIDAS.

Vous la voulez savoir, Madame ?

ÉRIPHILE.

Oui, dépêche. Qu’as-tu à me dire de Sostrate ?

CLITIDAS.

Une aventure merveilleuse, où personne ne s’attendait.

ÉRIPHILE.

Dis-moi vite ce que c’est.

CLITIDAS.

Cela ne troublera-t-il point, Madame, votre sombre mélancolie ?

ÉRIPHILE.

Ah ! parle promptement.

CLITIDAS.

J’ai donc à vous dire, Madame, que la Princesse votre mère passait presque seule dans la forêt, par ces petites routes qui sont si agréables, lorsqu’un sanglier hideux (ces vilains sangliers-là font toujours du désordre, et l’on devrait les bannir des forêts bien policées), lors, dis-je, qu’un sanglier hideux, poussé, je crois, par des chasseurs, est venu traverser la route où nous étions. Je devrais vous faire peut-être, pour orner mon récit, une description étendue du sanglier dont je parle, mais vous vous en passerez, s’il vous plaît, et je me contenterai de vous dire que c’était un fort vilain animal. Il passait son chemin, et il était bon de ne lui rien dire, de ne point chercher de noise avec lui ; mais la Princesse a voulu égayer sa dextérité, et de son dard, qu’elle lui a lancé un peu mal à propos, ne lui en déplaise, lui a fait au-dessus de l’oreille une assez petite blessure. Le sanglier, mal moriginé s’est impertinemment détourné contre nous ; nous étions là deux ou trois misérables qui avons pâli de frayeur ; chacun gagnait son arbre, et la Princesse