Page:Molière - Édition Louandre, 1910, tome 3.djvu/220

Cette page n’a pas encore été corrigée

dirai en marchant toutes les choses qu’il faut bien observer. Voilà la Princesse

ÉRIPHILE.

évitons sa rencontre.



Scène IV

ÉRIPHILE, CLÉONICE, SOSTRATE
ÉRIPHILE.

Hélas ! quelle est ma destinée, et qu’ai-je fait aux Dieux pour mériter les soins qu’ils veulent prendre de moi ?

CLÉONICE.

Le voici, Madame, que j’ai trouvé, et, à vos premiers ordres, il n’a pas manqué de me suivre.

ÉRIPHILE.

Qu’il approche, Cléonice, et qu’on nous laisse seuls un moment. Sostrate, vous m’aimez ?

SOSTRATE.

Moi, Madame ?

ÉRIPHILE.

Laissons cela,

SOSTRATE.

je le sais, je l’approuve, et vous permets de me le dire. Votre passion a paru à mes yeux accompagnée de tout le mérite qui me la pouvait rendre agréable. Si ce n’était le rang où le Ciel m’a fait naître, je puis vous dire que cette passion n’aurait pas été malheureuse, et que cent fois je lui ai souhaité l’appui d’une fortune qui pût mettre pour elle en pleine liberté les secrets sentiments de mon âme. Ce n’est pas, Sostrate, que le mérite seul n’ait à mes yeux tout le prix qu’il doit avoir, et que dans mon cœur je ne préfère les vertus qui sont en vous à tous les titres magnifiques dont les autres sont revêtus. Ce n’est pas même que la Princesse ma mère ne m’ait assez laissé la disposition de mes vœux, et je ne doute point, je vous l’avoue, que mes prières n’eussent pu tourner son consentement du côté que j’aurais voulu. Mais il est des états, Sostrate, où il n’est pas honnête de vouloir tout ce qu’on peut faire ; il y a des chagrins à se mettre au-dessus de toutes choses, et les bruits fâcheux de la renommée