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Prends sur toi plus d’empire.

TIRCIS

Rien ne me peut secourir.

LYCASTE et MENANDRE

C’est trop, c’est trop céder.

TIRCIS

C’est trop, c’est trop souffrir.

LYCASTE et MENANDRE

Quelle faiblesse !

TIRCIS

Quel martyre !

LYCASTE et MENANDRE

Il faut prendre courage.

TIRCIS

Il faut plutôt mourir.

LYCASTE

Il n’est point de bergère Si froide et si sévère, Dont la pressante ardeur D’un cœur qui persévère Ne vainque la froideur.

MENANDRE

Il est, dans les affaires Des amoureux mystères, Certains petits moments Qui changent les plus fières, Et font d’heureux amants.

TIRCIS

Je la vois, la cruelle, Qui porte ici ses pas ; Gardons d’être vu d’elle. L’ingrate, hélas ! N’y viendrait pas.



Scène III

CALISTE

Ah ! que sur notre cœur La sévère loi de l’honneur Prend un cruel empire ! Je ne fais voir que rigueurs pour Tircis, Et cependant, sensible à ses cuisants soucis, De sa langueur en secret je soupire, Et voudrais bien soulager son martyre. C’est à vous seuls que je le dis : Arbres, n’allez pas le redire.

Puisque le Ciel a voulu nous former Avec un cœur qu’amour peut enflammer, Quelle rigueur impitoyable Contre des traits si doux nous force à nous armer, Et pourquoi, sans être blâmable, Ne peut-on pas aimer Ce que l’on trouve aimable ?

Hélas ! que vous êtes heureux, Innocents animaux, de vivre sans contrainte,