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auprès de vous, un beau petit morveux de prince.

TIMOCLÈS.

Il n’y a rien que je ne fasse pour Clitidas.

CLITIDAS.

Belles paroles de tous côtés. Voici la Princesse ; prenons mon temps pour l’aborder.



Scène V

ÉRIPHILE, CLÉONICE
CLÉONICE.

On trouvera étrange, Madame, que vous vous soyez ainsi écartée de tout le monde.

ÉRIPHILE.

Ah ! qu’aux personnes comme nous, qui sommes toujours accablées de tant de gens, un peu de solitude est parfois agréable, et qu’après mille impertinents entretiens il est doux de s’entretenir avec ses pensées ! Qu’on me laisse ici promener toute seule.

CLÉONICE.

Ne voudriez-vous pas, Madame, voir un petit essai de la disposition de ces gens admirables qui veulent se donner à vous ? Ce sont des personnes qui, par leurs pas, leurs gestes et leurs mouvements, expriment aux yeux toutes choses, et on appelle cela pantomimes. J’ai tremblé à vous dire ce mot, et il y a des gens dans votre cour qui ne me le pardonneraient pas.

ÉRIPHILE.

Vous avez bien la mine, Cléonice, de me venir ici régaler d’un mauvais divertissement ; car, grâce au Ciel, vous ne manquez pas de vouloir produire indifféremment tout ce qui se présente à vous, et vous avez une affabilité qui ne rejette rien. Aussi est-ce à vous seule qu’on voit avoir recours toutes les muses nécessitantes ; vous êtes la grande protectrice du mérite incommodé ; et tout ce qu’il y a de vertueux indigents au monde va débarquer chez vous.

CLÉONICE.

Si vous n’avez pas envie de les voir, Madame, il ne faut que les laisser là.

ÉRIPHILE.

Non, non ; voyons-les, faites-les venir.

CLÉONICE.