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est plus embarrassée que la mienne.

SOSTRATE.

Ah ! mon cœur, ah ! mon cœur, où m’avez-vous jeté ?

CLITIDAS.

Serviteur, Seigneur Sostrate.

SOSTRATE.

Où vas-tu, Clitidas ?

CLITIDAS.

Mais vous plutôt, que faites-vous ici ? et quelle secrète mélancolie, quelle humeur sombre, s’il vous plaît, vous peut retenir dans ces bois, tandis que tout le monde a couru en foule à la magnificence de la fête dont l’amour du Prince Iphicrate vient de régaler sur la mer la promenade des princesses, tandis qu’elles y ont reçu des cadeaux merveilleux de musique et de danse, et qu’on a vu les rochers et les ondes se parer de divinités pour faire honneur à leurs attraits ?

SOSTRATE.

Je me figure assez, sans la voir, cette magnificence, et tant de gens d’ordinaire s’empressent à porter de la confusion dans ces sortes de fêtes, que j’ai cru à propos de ne pas augmenter le nombre des importuns.

CLITIDAS.

Vous savez que votre présence ne gâte jamais rien, et que vous n’êtes point de trop, en quelque lieu que vous soyez. Votre visage est bien venu partout, et il n’a garde d’être de ces visages disgraciés qui ne sont jamais bien reçus des regards souverains. Vous êtes également bien auprès des deux Princesses ; et la mère et la fille vous font assez connaître l’estime qu’elles font de vous, pour n’appréhender pas de fatiguer leurs yeux ; et ce n’est pas cette crainte enfin qui vous a retenu.

SOSTRATE.

J’avoue que je n’ai pas naturellement grande curiosité pour ces sortes de choses.

CLITIDAS.

Mon Dieu ! quand on n’aurait nulle curiosité pour les choses, on en a toujours pour aller où l’on trouve tout le monde, et quoi que vous puissiez dire, on ne demeure point tout seul, pendant une fête, à rêver parmi des arbres, comme