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PREMIER MÉDECIN.

Le malade est un sot ; d’autant plus que, dans la maladie dont il est attaqué, ce n’est pas la tête, selon Galien, mais la rate, qui lui doit faire mal.

LE PAYSAN.

Quoi que c’en soit, monsieur, il a toujours, avec cela, un cours de ventre depuis six mois.

PREMIER MÉDECIN.

Ben ! c’est signe que le dedans se dégage. Je l’irai visiter dans deux ou trois jours ; mais, s’il mouroit avant ce temps-là, ne manquez pas de m’en donner avis ; car il n’est pas de la civilité qu’un médecin visite un mort.

LA PAYSANNE, au médecin.

Mon pére, monsieur, est toujours malade de plus en plus.

PREMIER MÉDECIN.

Ce n’est pas ma faute. Je lui donne des remèdes : que ne guérit-il ? Combien a-t-il été saigné de fois ?

LA PAYSANNE.

Quinze, monsieur, depuis vingt jours.

PREMIER MÉDECIN.

Quinze fois saigné ?

LA PAYSANNE.

Oui.

PREMIER MÉDECIN.

Et il ne guérit point ?

LA PAYSANNE.

Non, monsieur.

PREMIER MÉDECIN.

C’est signe que la maladie n’est pas dans le sang. Nous le ferons purger autant de fois, pour voir si elle n’est pas dans les humeurs ; et, si rien ne nous réussit, nous l’enverrons[1] aux bains.

L’APOTHICAIRE.

Voilà le fin, cela ; voilà le fin de la médecine.


Scène IX.

ÉRASTE, PREMIER MÉDECIN, UN APOTHICAIRE.
ÉRASTE, au médecin.

C’est moi, monsieur, qui vous ai envoyé parler, ces jours

  1. Var. Nous l’envoierons.