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MYRTIL.

Sans savoir ce que c’est, mon cœur a su le faire.

LYCARSIS.

Mais cet amour me choque, et n’est pas nécessaire.

MYRTIL.

Vous ne deviez donc pas, si cela vous déplaît,
Me faire un cœur sensible et tendre comme il est.

LYCARSIS.

Mais ce cœur que j’ai fait me doit obéissance.

MYRTIL.

Oui, lorsque d’obéir il est en sa puissance.

LYCARSIS.

Mais enfin, sans mon ordre il ne doit point aimer.

MYRTIL.

Que n’empêchiez-vous donc que l’on pût le charmer ?

LYCARSIS.

Eh bien ! je vous défends que cela continue.

MYRTIL.

La défense, j’ai peur, sera trop tard venue.

LYCARSIS.

Quoi ? les pères n’ont pas des droits supérieurs ?

MYRTIL.

Les Dieux, qui sont bien plus, ne forcent point les cœurs.

LYCARSIS.

Les Dieux… Paix, petit sot ! Cette philosophie
Me…

DAPHNÉ.

Ne vous mettez point en courroux, je vous prie.

LYCARSIS.

Non : je veux qu’il se donne à l’une pour époux,
Ou je vais lui donner le fouet tout devant vous :
Ah ! ah ! je vous ferai sentir que je suis père.

DAPHNÉ.

Traitons, de grâce, ici les choses sans colère.

ÉROXÈNE.

Peut-on savoir de vous cet objet si charmant
Dont la beauté, Myrtil, vous a fait son amant ?

MYRTIL.

Mélicerte, Madame. Elle en peut faire d’autres.

ÉROXÈNE.

Vous comparez, Myrtil, ses qualités aux nôtres ?