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DAPHNÉ.

Le Ciel tienne, pasteur, vos brebis toujours saines !

ÉROXÈNE.

Cérès tienne de grains vos granges toujours pleines !

LYCARSIS.

Et le grand Pan vous donne à chacune un époux
Qui vous aime beaucoup, et soit digne de vous !

DAPHNÉ.

Ah ! Lycarsis, nos vœux à même but aspirent.

ÉROXÈNE.

C’est pour le même objet que nos deux cœurs soupirent.

DAPHNÉ.

Et l’Amour, cet enfant qui cause nos langueurs,
A pris chez vous le trait dont il blesse nos cœurs.

ÉROXÈNE.

Et nous venons ici chercher votre alliance,
Et voir qui de nous deux aura la préférence.

LYCARSIS.

Nymphes…

DAPHNÉ.

Nymphes…Pour ce bien seul nous poussons des soupirs.

LYCARSIS.

Je suis…

ÉROXÈNE.

Je suis…À ce bonheur tendent tous nos désirs.

DAPHNÉ.

C’est un peu librement expliquer sa pensée.

LYCARSIS.

Pourquoi ?

ÉROXÈNE.

Pourquoi ?
La bienséance y semble un peu blessée.

LYCARSIS.

Ah ! point.

DAPHNÉ.

Ah ! point. Mais quand le cœur brûle d’un noble feu,
On peut sans nulle honte en faire un libre aveu.

LYCARSIS.

Je…

ÉROXÈNE.

Je…
Cette liberté nous peut être permise,
Et du choix de nos cœurs la beauté l’autorise.