Page:Molière - Édition Louandre, 1910, tome 2.djvu/255

Cette page a été validée par deux contributeurs.

Martine

Crois-tu que je m’épouvante de tes paroles ?

Sganarelle

Doux objet de mes vœux, je vous frotterai les oreilles.

Martine

Ivrogne que tu es !

Sganarelle

Je vous battrai.

Martine

Sac à vin !

Sganarelle

Je vous rosserai.

Martine

Infâme !

Sganarelle

Je vous étrillerai.

Martine

Traître ! insolent ! trompeur ! lâche ! coquin ! pendard ! gueux ! belître ! fripon ! maraud ! voleur ! …

Sganarelle

Ah ! vous en voulez donc !

Sganarelle prend un bâton et bat sa femme

Martine, criant

Ah ! ah ! ah ! ah !

Sganarelle

Voilà le vrai moyen de vous apaiser[1].


Scène 2

M. Robert, Sganarelle, Martine
Monsieur Robert

Holà ! holà ! holà ! Fi ! Qu’est ceci ? Quelle infamie ! Peste soit le coquin, de battre ainsi sa femme !

Martine, les mains sur les côtés, parle à M. Robert en le faisant reculer, et à la fin lui donne un soufflet.

Et je veux qu’il me batte, moi.

  1. Si l’on en croit l’éditeur des œuvres de Boileau publiées en 1713, l’original de Sganarelle serait le perruquier l’Amour que Boileau célébra depuis dans le Lutrin. Il ajoute que Molière traça cette première sur ce que lui en avait dit Boileau, circonstance confirmée par Ménage et pas Brossette : « Didier l’Amour, perruquier qui demeuroit dans la cour du Palais, dit Brossette, et dont la boutique étoit sous l’escalier de la Sainte-Chapelle, étoit un gros et grand homme d’asser bon air, vigoureux, et bien fait. Il avoit été marié deux fois ; sa première étoit extrêmement emportée… Molière a peint le caractère de l’un et de l’autre dans son Médecin malgré lui. »