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un présent à votre épouse, m’a fort prié de venir vous parler pour lui, et de vous dire qu’il en a un à vendre, le plus parfait du monde.

Sganarelle

Mon Dieu ! cela n’est pas pressé.

Géronimo

Comment ! que veut dire cela ? Où est l’ardeur que vous montriez tout à l’heure ?

Sganarelle

Il m’est venu, depuis un moment, de petits scrupules sur le mariage. Avant que de passer plus avant, je voudrais bien agiter à fond cette matière, et que l’on m’expliquât un songe que j’ai fait cette nuit, et qui vient tout à l’heure de me revenir dans l’esprit. Vous savez que les songes sont comme des miroirs, où l’on découvre quelquefois tout ce qui nous doit arriver. Il me semblait que j’étais dans un vaisseau, sur une mer bien agitée, et que…

Géronimo

Seigneur Sganarelle, j’ai maintenant quelque petite affaire qui m’empêche de vous ouïr. Je n’entend rien du tout aux songes ; et quant au raisonnement du mariage, vous avez deux savants, deux philosophes, vos voisins, qui sont gens à vous débiter tout ce qu’on peut dire sur ce sujet. Comme ils sont de sectes différentes, vous pouvez examiner leurs diverses opinions là-dessus. Pour moi, je me contente de ce que je vous ai dit tantôt, et demeure votre serviteur.

Sganarelle

Il a raison. Il faut que je consulte un peu ces gens-là sur l’incertitude où je suis.




Scène VI. — Pancrace, Sganarelle.

Pancrace, (se tournant du côté où il est entré, et sans voir Sganarelle.)

Allez, vous êtes un impertinent, mon ami, un homme ignare de toute bonne discipline, bannissable de la république des lettres.

Sganarelle

Ah ! bon, en voici un fort à propos.

Pancrace, (de même, sans voir Sganarelle.)

Oui, je te soutiendrai par vives raisons, je te montrerai par Aristote, le Philosophe des philosophes, que tu es un