Point du tout. C’est toi qu’il épargne, et nous trouverons d’autres juges.
« Soit. Mais, dis-moi, Chevalier, crois-tu pas que ton Molière est épuisé maintenant, et qu’il ne trouvera plus de matière pour...
« Plus de matière ? Eh ! mon pauvre Marquis, nous lui en fournirons toujours assez, et nous ne prenons guère le chemin de nous rendre sages pour tout ce qu’il fait et tout ce qu’il dit.»
Attendez, il faut marquer davantage tout cet endroit. Écoutez-le-moi dire un peu. « Et qu’il ne trouvera plus de matière pour. – Plus de matière ? Hé ! mon pauvre Marquis, nous lui en fournirons toujours assez, et nous ne prenons guère le chemin de nous rendre sages pour tout ce qu’il fait et tout ce qu’il dit. Crois-tu qu’il ait épuisé dans ses comédies tout le ridicule des hommes ? Et, sans sortir de la cour, n’a-t-il pas encore vingt caractères de gens où il n’a point touché ? N’a-t-il pas, par exemple, ceux qui se font les plus grandes amitiés du monde, et qui, le dos tourné, font galanterie de se déchirer l’un l’autre ? N’a-t-il pas ces adulateurs à outrance, ces flatteurs insipides, qui n’assaisonnent d’aucun sel les louanges qu’ils donnent, et dont toutes les flatteries ont une douceur fade qui fait mal au cœur à ceux qui les écoutent ? N’a-t-il pas ces lâches courtisans de la faveur, ces perfides adorateurs de la fortune, qui vous encensent dans la prospérité et vous accablent dans la disgrâce ? N’a-t-il pas ceux qui sont toujours mécontents de la cour, ces suivants inutiles, ces incommodes assidus, ces gens, dis-je, qui pour services ne peuvent compter que des importunités, et qui veulent que l’on les récompense d’avoir obsédé le prince dix ans durant ? N’a-t-il pas ceux qui caressent également tout le monde, qui promènent leurs civilités à droite et à gauche, et courent à tous ceux qu’ils voient avec les mêmes embrassades et les mêmes protestations d’amitié ? » Monsieur, votre très humble serviteur. — Monsieur, je suis tout à votre service. — Tenez-moi des vôtres, mon cher. —