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Mon visage, friponne,
Dans cette occasion rend vos sens effrayés,
Et c’est à contre-cœur qu’ici vous me voyez.
Je trouble en ses projets l’amour qui vous possède.
(Agnès regarde si elle ne verra point Horace.)
N’appelez point des yeux le galant à votre aide :
Il est trop éloigné pour vous donner secours.
Ah ! ah ! si jeune encor, vous jouez de ces tours !

Votre simplicité, qui semble sans pareille,
Demande si l’on fait les enfants par l’oreille ;
Et vous savez donner des rendez-vous la nuit,
Et pour suivre un galant vous évader sans bruit !
Tudieu ! comme avec lui votre langue cajole !
Il faut qu’on vous ait mise à quelque bonne école.
Qui diantre tout d’un coup vous en a tant appris ?
Vous ne craignez donc plus de trouver des esprits ?
Et ce galant, la nuit, vous a donc enhardie ?
Ah ! coquine, en venir à cette perfidie !
Malgré tous mes bienfaits former un tel dessein !
Petit serpent que j’ai réchauffé dans mon sein,
Et qui, dès qu’il se sent, par une humeur ingrate,
Cherche à faire du mal à celui qui le flatte !

Agnès.

Pourquoi me criez-vous ?

Arnolphe.

J’ai grand tort en effet !

Agnès.

Je n’entends point de mal dans tout ce que j’ai fait.

Arnolphe.

Suivre un galant n’est pas une action infâme ?

Agnès.

C’est un homme qui dit qu’il me veut pour sa femme :
J’ai suivi vos leçons, et vous m’avez prêché
Qu’il se faut marier pour ôter le péché.

Arnolphe.

Oui. Mais pour femme, moi je prétendais vous prendre ;
Et je vous l’avais fait, me semble, assez entendre.

Agnès.