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J.-B. POQUELIN DE MOLIERE.

confirmer ou démentir ces faits. La seule chose qui reste acquise, c’est qu’il reçut une bonne éducation classique, ce qui n’empêcha point son père de lui ménager la survivance de la charge de tapissier ordinaire du Roi, qu’il avait obtenue, parait-il, quelque temps après son mariage[1] »

Les commentateurs se sont livrés à de nombreuses

  1. Dans notre première édition, nous avons cité un passage dans lequel M. Bazin dit que l’on s’est étrangement mépris sur le sens et la portée de ce fait. « On a voulu y voir, dit l’écrivain que nous venons de citer, une sorte de contrainte paternelle, qui condamnait d’avance ce fils à un vil emploi, qui le vouait par anticipation au service domestique, et lui traçait son humble destinée. Il y a tout autre chose, et bien mieux que cela, dans la précaution du père et dans la libéralité du roi. Faire pourvoir son fils en survivance de la charge dont il était devenu titulaire, c’était lui transmettre dès lors la propriété, le faire maître d’un patrimoine, empêcher qu’après la mort du père cette charge ne fût un bien perdu pour sa succession, l’héritier préféré s’en trouvant déjà saisi. C’était donc avantager celui-ci d’une chose certaine et solide ; car, la mort du titulaire arrivant, le survivancier pouvait, à son choix, exercer la charge ou la vendre, en user ou en profiter.

    M. Taschereau, n’est point de cet avis.

    « Il est impossible, dit-il, d’admettre, avec MM. Bazin et Louandre, que le père de Molière l’ait fait recevoir en 1637 survivancier de la charge de tapissier du roi sans le destiner absolument à ce métier. S’il s’était agi d’une charge de valet de chambre simplement, le dire de M. Bazin pourrait être admissible, car un colonel, un capitaine de vaisseau, un fonctionnaire quelconque pouvait, outre sa fonction, remplir à son tour la charge fort peu spéciale de valet de chambre du roi. Il n’y avait pas là un long apprentissage à faire, un métier à apprendre. Mais les valets de chambre tapissiers, c’est l’État de la France qui nous l’apprend, devaient savoir raccommoder les meubles du roi et étaient appelés à en faire de neufs. Par conséquent, en même temps que le père de Molière faisait recevoir son fils survivancier, force lui était donc de lui faire faire ou compléter son apprentissage de tapissier. Reste-t-il jour là à des vues ultérieures ? »

    Nous avons cru devoir placer ces remarques sous les yeux de nos lecteurs, car l’autorité de M. Taschereau est d’un trop grand poids pour que nous ne la prenions point en considération.