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s qui de nous fassent un peu de bruit,


Dont la bouche écoutée avecque poids débite
Ce qui peut faire voir notre petit mérite.
Enfin j’aurois voulu que des gens bien instruits
Vous eussent pu, monsieur, dire ce que je suis.
Éraste.
Je vois assez, monsieur, ce que vous pouvez être,
Et votre seul abord le peut faire connoître.
Caritidès.
Oui, je suis un savant charmé de vos vertus,
Non pas de ces savants dont le nom n’est qu’en us  :
Il n’est rien si commun qu’un nom à la latine  ;
Ceux qu’on habille en grec ont bien meilleure mine  ;
Et pour en avoir un qui se termine en es,
Je me fais appeler monsieur Caritidès.
Éraste.
Monsieur Caritidès soit. Qu’avez-vous à dire  ?
Caritidès.
C’est un placet, monsieur, que je voudrois vous lire,
Et que, dans la posture où vous met votre emploi,
J’ose vous conjurer de présenter au roi.
Éraste.
Hé  ! Monsieur, vous pouvez le présenter vous-même.
Caritidès.
Il est vrai que le roi fait cette grâce extrême  ;
Mais par ce même excès de ses rares bontés,
Tant de méchants placets, monsieur, sont présentés,
Qu’ils étouffent les bons  ; et l’espoir où je fonde,
Est qu’on donne le mien quand le prince est sans monde.
Éraste.
Eh bien  ! Vous le pouvez, et prendre votre temps.


Caritidès.
Ah  ! Monsieur, les huissiers sont de terribles gens  !
Ils traitent les savants de faquins à nasardes,
Et je n’en puis venir qu’à la salle des gardes.
Les mauvais traitements qu’il me faut endurer
Pour jamais de la cour me feroient retirer,
Si je n’avois conçu l’espérance certaine